Comment Balenciaga est arrivé au sommet de la mode ?
20 Jul. 2022
Comment Balenciaga est arrivé au sommet de la mode ?
C’est avec une vision audacieuse et avant-gardiste que fonde sa maison de couture en 1917. Cette mode révolutionnaire perpétue grâce à ses successeurs, depuis la mort de son fondateur en 1968, année de la libération des mœurs et des esprits. Depuis, la griffe surfe sur le buzz et l’âme de la maison continue de traverser les époques, notamment avec l'arrivée du streetwear et de la sneaker dans le luxe. De Michel Doma à Demna Gvasalia, ils ont façonné la marque à leur façon. Voici l’histoire de l’ascension de , ou comment cette maison franco-espagnole, a révolutionné la mode.
Dans les jupons de la haute-société espagnole
Né d’une mère couturière et d’un père marin-pêcheur, Cristóbal Balenciaga puise son inspiration dans ses racines, grâce à des parents qui lui inculquent deux valeurs : l’artisanat et la rigueur. Très proche de la haute-société espagnole, sa mère le pousse vers la Marquise de Casa Torres, qui devient rapidement son mentor, et le forme à ce qui va devenir son domaine de prédilection : le tailleur.
Rapidement, il ouvre sa première boutique à Saint-Sébastien, où il rencontre déjà un franc succès auprès de la famille royale et de l’aristocratie espagnole. Ses commandes prennent de plus en plus d’ampleur, et son âge d’or débute dans les années 20. Mais l’arrivée de la dictature franquiste au pouvoir le contraint à fermer ses boutiques. Il plie bagage, se réfugie à Paris, et prend le risque de repartir de zéro. Il présente alors sa première collection haute-couture en 1937.
L'âme de la revisite des costumes
Jouer avec les codes des tenues traditionnelles fait partie de l’essence même de Balenciaga. Son rapport à la féminité et au corps de la femme l’emmène vers des sentiers encore inexplorés à l’époque. Chez Cristóbal, "on enveloppe le corps de la femme sans la restreindre", et on casse les codes. Une devise qui permet à ses successeurs de se connecter à Cristóbal, et de perpétuer les valeurs de la maison en les adaptant aux tendances actuelles.
Même en exil, le créateur reste fidèle à son pays natal et revisite les vêtements traditionnels espagnols, dans les années 50. Cependant, même si il sort des sentiers battus, ses classiques restent indétrônables. En effet, son tailleur semi-ajusté et sa robe style Empire font le bonheur de Maria Casarès et Marlène Dietrich.
Dans les années 60, la liberté des corps est à son paroxysme. On veut libérer le corps de la femme en bannissant le corset ou autres artifices. Cristóbal s’investit alors dans cette quête et crée un vestiaire de plus en plus épuré, qui permet une liberté de mouvement. Désormais, les silhouettes sont plus larges, à la limite de l’architecturale, avec des volumes qui représentent en grande partie ses collections. L’artiste repense la silhouette féminine en s’inspirant de l’Antiquité, notamment avec sa robe-tonneau, et perpétue dans le temps cet objectif.
Renaissance
Après la mort de Cristóbal Balenciaga en 1968, la maison ne semble pas vouée à l’abandon. Conscient de son importance dans le monde de la mode, Jacques Bogart prend la direction générale de la griffe, et confie l’âme artistique de la maison à Michel Doma. Après une première collection en 1987, qui récolte plusieurs avis mitigés, Nicolas Ghesquière arrive à sa tête. Encore inconnu du grand public, c’est lui qui conduit au prolongement du travail de Cristóbal, en y introduisant les codes de la génération actuelle. En rendant hommage à son fondateur, il impose l’esprit rigoureux et futuriste de la griffe, et révolutionne son esthétique en la remettant au goût du jour. Grâce à , Balenciaga connaît à nouveau le succès, et se renouvelle quinze ans après la mort de son créateur.
En partant, Nicolas Ghesquière laisse derrière lui un riche héritage à , qui prend sa relève. Sa première collection dévoilée à Paris en février 2013, présente des silhouettes en hommage au vestiaire de Cristóbal. Une nouvelle renaissance pour la maison et un nouveau bond dans ses archives, qui lui vaut une très grande reconnaissance, et prolonge ainsi le travail entamé par Ghesquière.
Dans les griffes de Demna
Depuis 2015, la direction artistique de la maison Balenciaga est dirigée par Demna Gvasalia. Idole de la génération Z grâce à sa vision novatrice du streetwear, il est le parfait exemple du génie visionnaire. En 2021, il réintroduit avec brio la ligne haute-couture, et fait défiler un parterre de célébrités, dont , lors d'une seconde collection couture dévoilée il y a quelques semaines.
En s’adressant à un public genderless, Demna Gvasalia réinterprète l’immense talent de son fondateur, en y introduisant ses propres codes. Se considérant comme "weirdo et solitaire", il finit par accepter que sa vision du style et du luxe soit différente. Il s’en sert pour en faire sa force, et contribuer à forger son succès. À l'époque, la Maison a construit de nombreuses bases pour la mode d’aujourd’hui. les perpétuent en arrivant à parler à la génération actuelle, et ainsi créer un vocabulaire de mode contemporain.
À l’heure actuelle, il est difficile de porter une robe de chambre, mais beaucoup plus facile de porter une doudoune à col basculé vers l’arrière, qui permet de se sentir cool tout en ayant l’attitude couture impulsée par Cristóbal Balenciaga. - Demna Gvasalia pour
En s’inspirant de ce que portent les gens au quotidien, comme les tee-shirts ou les baskets, il a su redesigner un vestiaire couture avec des vêtements du quotidien, et offre ainsi la meilleure version de ces pièces. Proposée comme une expérience à la base, la première paire de sneaker lancée par Balenciaga, la Speed Trainer, a prit énormément d'ampleur sur le marché. Cette dernière a impacté toute l’industrie du luxe, et toutes les maisons proposent aujourd’hui des sneakers, ou collaborent avec des marques de sportswear, à l’instar de [Jacquemus et Nike](https://wethenew.com/blogs/le-blueprint/jacquemus-nike-defile-le-papier-humara "Retour sur "Le Papier", le défilé Jacquemus dans les salines de Camargue ").
Avec une approche de la mode très conceptuelle et très axée sur l’art, Demna Gvasalia se projette vers de nouveaux horizons tout en restant cantonné au passé, et l’envie de retourner aux sources. Face à une génération avide de changement et de mode de vie durable, il propose une version de la couture adaptée à la genZ. Il forge son succès grâce à une mode qui ne se limite pas à un seul genre, et s’adapte à l’inclusivité. Ses défilés sont témoins de nombreuses situations actuelles, comme le réchauffement climatique ou la guerre en Ukraine. Le designer fait passer des messages à travers le regard d’un nouveau vestiaire et propose des scénographies complètes, à mille lieux des autres maisons.
C’est ainsi que malgré les années, et l'aspect cyclique de la mode, Balenciaga a su entretenir le flambeau passé par Cristóbal. Au regard de ses successeurs, comme Ghesquière ou Demna, la Maison reste fidèle à ses origines et à ses codes, afin de toujours perpétuer son ascension. Elle se hisse aujourd’hui au sommet des .
Crédits photos : Vogue, Business of Fashion, An0ther Magazine, France Info et Numéro Magazine.